Investir dans « Bpifrance Entreprises 1 » : vraie ou fausse bonne idée ?

07/07/2021
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Article initialement écrit le 14 Octobre 2020

Vous avez dû entendre parler de ce fonds d’investissement mis en avant par le gouvernement à la télé, à la radio ou dans les journaux. Le 30 septembre un communiqué était envoyé à tous les organes de presse :

« Bruno Le Maire, ministre de l’Économie et Bpifrance annoncent le lancement, le 1er octobre, du fonds « Bpifrance Entreprises 1 » qui permet aux particuliers d’investir dans 1500 entreprises majoritairement françaises et non cotées, issues du portefeuille des fonds de capital-investissement partenaires de Bpifrance. »

Les Français vont pouvoir financer l’économie réelle, la PME près de chez eux : voilà la promesse !

De prime abord, l’idée semble séduisante, mais en creusant le sujet, la mariée apparaît moins belle que promis.

Des innovations positives

Attirer l’attention des Français sur le financement des entreprises non cotées est une excellente chose. Ces entreprises (PME ou ETI) font l’emploi, maintiennent le tissu industriel français, embauchent plusieurs de vos proches et elles ont besoin d’argent frais pour financer leur développement : bingo, on explique les vertus du capital-investissement !

De plus, ce fonds sera investi dans 1500 entreprises : cette diversification est une excellente chose pour disperser le risque et s’assurer une performance conforme au développement de nos PME.

Du flou et des loups

Tout cela semble d’abord enthousiasmant, mais une analyse approfondie révèle de très mauvaises surprises.

Il faut le dire franchement : le particulier qui se laissera séduire ne financera pas l’économie, mais la BPI !

En effet, aucune entreprise ne verra la couleur de cet argent pour financer ses projets de développement. La BPI se sépare d’une partie de son portefeuille de fonds de capital-investissement et le revend aux particuliers. C’est elle qui encaissera l’argent des souscriptions, pas les entreprises ! La promesse du financement de l’économie en prend un sacré coup…

Mais à quel prix la BPI revend-elle ses positions ? Il n’a échappé à personne que la crise actuelle fait beaucoup souffrir les entreprises. Baisse de chiffres d’affaires, effondrement des bénéfices : tout cela impacte la valeur d’une entreprise. Est-ce pris en compte dans le prix payé par l’investisseur ? On n’en sait rien. La BPI vous intime d’accorder votre confiance en assurant que deux mystérieuses institutions privées « reconnues et indépendantes » ont négocié un prix avec elle pour acquérir un portefeuille semblable au fonds proposé aux Français.

Reconnues ? Pas connues des investisseurs en tout cas. Indépendantes ? Quand on connaît en France la connivence entre certaines grandes institutions privées et la puissance publique, on peut en douter. En tout état de cause, la transparence devrait être parfaite sur cette question centrale.

Des informations circulent « en off » dans les milieux autorisés. On a assuré à l’auteur de ce billet, sur le ton de la confidence, qu’il y avait une belle décote et aucun souci à se faire. Dormez braves gens ! Coluche aurait pu actualiser son sketch : « On s’autorise à penser… »

Toujours concernant l’information livrée à l’investisseur, connaissons-nous le détail des 1500 entreprises dans lesquelles ce fonds sera investi ? Eh bien non, on ne peut pas le savoir. La BPI n’évoque qu’une dizaine d’exemples, choisis on ne sait comment. Et puisqu’il s’agit d’un fonds de fonds, on ne connaît pas plus le détail des 145 fonds qui composent « Bpifrance Entreprises 1 ».

Ce flou n’est pas de nature à éclairer le choix de l’investisseur.

Quant aux performances promises, entre 5 à 7% par an (sans garantie), elles peuvent s’expliquer par un niveau de frais élevé : 3,92% par an ! Ce niveau de frais est assez fréquent dans ce type d’investissement mais le rendement est alors plutôt de l’ordre de 10% annualisé…

Ces éléments laissent songeur mais faut-il désespérer ? Doit-on abandonner l’idée de financer les entreprises ou de placer son épargne dans de bonnes conditions ? Non, des alternatives existent bel et bien !

Et si vous pouviez faire mieux ?

Oublions un instant les promesses de Bruno Le Maire.

Vous souhaitez financer l’économie ? Les FCPR (un nom barbare) vous permettent véritablement de confier votre argent aux entrepreneurs de talent pour qu’ils développent leur entreprise et… votre investissement. Le risque est présent mais la rentabilité également !

Vous étiez séduit par une performance attendue de 5 à 7% ? Avec beaucoup plus de liberté, vous pouvez investir dans un portefeuille d’actions internationales de grandes entreprises pour une performance au moins comparable. Regardez celle du MSCI World sur votre moteur de recherche préféré… De la même manière, une telle performance peut être recherchée en investissant dans des entreprises européennes de taille intermédiaire. De nombreux fonds existent mais vous pouvez, vous aussi, vous former à devenir investisseur en direct.

Soutenons nos entreprises, investissons notre épargne : nous serons tous gagnants et Bruno Le Maire pourra faire un communiqué triomphant !