First Eagle : les perspectives d'un fonds historique

24/01/2022
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Merci à Jan Vormoor, senior investment specialist de First Eagle, d’avoir répondu à nos questions

 

Pouvez-vous commenter le comportement du fonds en 2021, son positionnement et sa performance ? 

2021 a été une année intéressante, surprenante. Le début d’année a été très chahuté à cause du covid, puis nous avons vécu un très fort rebond. Le fonds a performé en ligne avec ce qu’on peut attendre dans ce type de marché : plus de 18% pour un investisseur en euro.

Dans notre portefeuille, la poche actions a globalement bien performé ; l’or a en revanche tiré la performance à la baisse, contrairement à 2020, ce qui est attendu dans un contexte de marché très performant. Globalement le fonds a bien profité de son positionnement value.

 

Vous vous attachez à investir dans des entreprises dont le prix est décoté par rapport à leur valeur intrinsèque, mais aujourd’hui les marchés actions ne sont-ils pas surévalués, notamment dans l’hypothèse d’une remontée des taux ?

En moyenne les valorisations sont assez élevées, mais si vous vous écartez de la moyenne, votre jugement devra être plus fin. Il y a une forte concentration des valorisations élevées sur les titres américains et liées aux nouvelles technologies. Quand on s’éloigne de ce secteur et des Etats-Unis, en allant vers l’Europe, l’Asie et des secteurs davantage traditionnels, alors on trouve des entreprises à la valorisation attractive.

 

En cas d’inflation et/ou de remontée des taux, dans quelles entreprises investir ?

D’abord que faut-il éviter ? S’il y a remontée des taux, il faut éviter les entreprises très fortement valorisées. En effet, leur valorisation est construite sur un modèle d’anticipation des revenus futurs : si les taux remontent, alors les revenus du futur sont moins valorisés. 

Il faut trouver des entreprises détenant des actifs réels rares et difficiles à dupliquer, ce qui constitue une protection face à l’inflation. Nous pouvons prendre l’exemple du pétrole, de l’or, de l’immobilier bien placé.

Il faut aussi s’intéresser aux entreprises avec une élasticité prix faible, c’est-à-dire des entreprises perdant peu de clients en cas d’augmentation de leurs prix, soit parce que le client n’a pas le choix (situation de monopole), soit parce que le client n’a pas envie de changer. Il y a aussi le cas des entreprises qui, grâce à leur taille critique et à leur organisation, ont le pouvoir de négocier avec leurs fournisseurs et de travailler leur structure de coûts. 

L’immunisation contre l’inflation doit se voir à long terme. Certaines entreprises ont besoin de temps pour réorganiser leur chaîne d’approvisionnement. En cas d’inflation, les investisseurs de court terme peuvent sanctionner en bourse ce genre de titres et c’est alors une opportunité pour des investisseurs comme nous de rentrer au capital avec un bon point d’entrée.

 

 

Anticipez-vous que les banques centrales réduisent leur politique expansionniste ? 

Il faut regarder banque centrale par banque centrale. La Chine vient d’annoncer une politique plus accommodante alors que la Fed a annoncé l’inverse. Aujourd’hui les banques centrales sont confrontées à des objectifs contradictoires : assurer la stabilité financière et lutter contre l’inflation.

 

La masse monétaire a fortement augmenté, l’inflation s’installe : contre cela il semblerait que vous misiez sur l’or pour protéger vos investisseurs. Mais l’or rend-il encore ce genre de service ? Les crypto-actifs ne sont-ils pas en train de le remplacer aux yeux des investisseurs ?

Pour nous, l’or a certains avantages que les crypto-actifs n’ont pas encore. L’or joue encore son rôle, mais est-ce que ce rôle n’est pas affaibli par le poids des cryptos ? Le temps long le dira. Ce qu’on peut constater, c’est qu’aujourd’hui les cryptos se comportent plus comme un actif spéculatif que comme un actif de protection contre les risques systémiques. L’or a l’avantage d’avoir prouvé historiquement la corrélation entre son prix et les taux d’intérêt réels. Et cette corrélation est liée à un lien de causalité. A courte terme, les flux des investisseurs peuvent avoir un impact sur l’efficacité de l’or, mais cette causalité reste.

L’or est très stable : la croissance de l’offre de l’or est en moyenne, depuis 2 000 ans, de l’ordre de 2% par an.

 

Pouvez-vous citer une entreprise qui illustre bien votre approche de l’investissement et semble bien positionnée pour les années à venir ?

CH ROBINSON WORLDWILDE

Entreprise américaine qui est en même temps dans l’économie traditionnelle et la nouvelle économie. C’est en quelque sorte le UBER des camionneurs. L’entreprise gère une plateforme digitale qui permet aux sociétés de transport de trouver des clients et aux entreprises qui ont des besoins d’acheminement de trouver des camionneurs. C’est une entreprise avec un long historique et qui a su basculer vers un modèle digital. Ils dominent leur marché et le cercle devient vertueux : davantage de gains d’échelle et d’efficacité pour le client. Ils sont leaders et dans ce genre de business, « le vainqueur prend tout ». Par ailleurs, ce service tend à faire baisser le nombre de camions circulant à vide et a donc un effet concret sur la pollution due aux transports.

Il faut noter que cette entreprise est sensible au cycle économique car son activité dépend de l’activité industrielle.

 

Les informations, commentaires et analyses contenus ici sont fournis à titre purement informatif et ne sauraient être considérés comme un conseil en placement, un conseil fiscal, une recommandation ou un conseil en investissement.